Décrypter les rêves pour guérir

Cancers
Décrypter les rêves pour guérir

Parce qu’ils permettent d’agir sur la souffrance, mais aussi parce qu’ils savent décrypter les rêves, certains psychologues peuvent avoir un impact bénéfique sur la maladie. Pour Bulle Santé, Bernard Mirande, psychologue et onirothérapeute, souligne les vertus d’un accompagnement de qualité.

L’interview est disponible dans le podcast audio Bulle Santé ci-dessous :

 

Quel est le lien entre les rêves et les maladies chroniques ?

Le rêve apporte des éléments permettant d’identifier d’où vient la maladie, comment elle s’est construite et comment on peut la guérir. La maladie est inscrite dans les rêves (à la fois ses causes et ses origines). Il s’agit d’observer comment la personne guérit petit à petit grâce à la progression symbolique des rêves. On amène une personne vers la guérison, en parallèle de son travail avec un médecin. Le problème, c’est qu’un patient consulte rarement un psychologue en premier recours. Si ces thérapies étaient remboursées, les patients seraient plus nombreux à soigner la cause, là où le médecin va soigner le symptôme.

Selon vous, quel est l’impact du suivi psychologique dans le processus de guérison de la maladie ?

Il est très difficile de donner un pourcentage, mais ce suivi permet de développer sa conscience et de savoir d’où provient sa maladie. Les personnes qui étudient leur maladie ont souvent une attitude différente, généralement plus ouverte sur les autres.

Quelle différence y a-t-il entre la souffrance et la douleur ?

La douleur est quelque chose de physique, un état de crise soigné par un médecin. La  souffrance, en revanche, implique une dimension psychologique.  Il y a des souffrances morales qui entraînent des maladies et donc des douleurs. Mais il y a aussi des douleurs qui ne partent pas facilement et qui vont donc entraîner une souffrance morale et psychologique.

Dans quelle mesure le travail du psychologue permet il d’influer sur la souffrance et la douleur ?

Certaines petites maladies disparaissent sans soin particulier, d’autres persistent et s’aggravent. Elles entraînent alors une souffrance qui augmente à cause de la peur et des doutes. C’est généralement à ce moment là que le malade sollicite l’aide d’un psychologue. Ce dernier ne va pas être en mesure de traiter la douleur, mais peut prendre en charge la souffrance, si elle est liée au domaine psychologique. Parfois, en guérissant la souffrance morale, certaines maladies disparaissent.

Comment intervenez vous auprès des personnes atteintes du cancer ?

Souvent les personnes qui consultent un psychologue ne sont pas bien renseignées et voudraient être soignées rapidement. Si ce n’est pas le cas, elles se lassent et abandonnent beaucoup trop tôt. Elles ne se rendent pas toujours compte qu’il faut du temps. Les patients qui font l’effort de rester en thérapie, en complément du travail des médecins, optimisent les chances de pouvoir guérir. Cela suppose de pouvoir sortir de tous ses conditionnements (familiaux, religieux, sociaux…).

Quel est l’apport spécifique de la technique d’analyse des rêves pour les personnes malades ?

Par les rêves on va agrandir le champ de conscience. Le psychologue n’impose pas une façon de penser ; il parle avec le patient pendant la séance. Certaines phrases vont avoir un retentissement particulier dans les rêves. Il s’agit de permettre au patient de comprendre comment il a vécu la maladie, de se remettre en question… C’est justement long parce qu’il faut trouver les phrases à dire, ou à ne pas dire, et comment les dire.

Est-ce que vous pensez qu’il faut toujours dire la vérité au malade ?

Ca dépend de la personne, et même de la famille. Certains médecins prennent la liberté d’annoncer l’issue fatale, d’autres non. Il faut s’adapter à la personne qui est en face.  Ce n’est pas toujours simple quand on ne connaît pas trop le malade ni son entourage. C’est le travail du psychologue de rencontrer plusieurs fois la personne pour savoir ce qu’il faut lui dire. Parfois, il est nécessaire de dire la vérité. Parfois, les personnes ne sont pas du tout prêtes à l’entendre et ce serait plus grave encore. Certains malades ont besoin de savoir qu’ils sont malades pour pouvoir réagir, quand d’autres peuvent s’écrouler à cette annonce.

Quel travail demandez vous aux personnes d’effectuer par rapport à leurs rêves ?

Certaines personnes ne sont pas prêtes à noter leurs rêves, elles n’en ont ni la volonté ni le désir. Le psychologue ne pourra alors rien faire, ou bien le travail sera très long. Si la personne fait l’effort de noter ses rêves, elle aura tous les moyens pour connaître les causes de sa maladie. Toute maladie est explicitée de façon précise à travers les rêves mais il faut en noter quelque fois beaucoup pour que l’inconscient puisse sortir des explications. Le psychologue intervient pour aider la personne à passer de l’inconscient à la conscience.

Est-ce que les malades du cancer font des rêves particuliers liés à leur maladie ?

Oui, beaucoup de symboles liés à la multiplication émergent, puisqu’il y a une multiplication des cellules cancéreuses. La multitude n’est pas obligatoirement le symbole du cancer, mais elle est très fréquente dans les rêves des personnes atteintes. Quand un patient veut absolument traverser une route avec des voitures qui filent dans les deux sens, cela traduit la peur de la mort. Une fourmilière en pleine action va aussi représenter les cellules cancéreuses. Certains rêvent seront marqués par l’arborescence, comme dans l’Ecume des jours de Boris Vian où la chambre de Chloë se voit inondée de plus en plus de fleurs.

Quels sont les images et les symboles les plus fréquents dans les rêves des personnes touchées par le cancer ?

Certaines personnes atteintes du cancer peuvent aussi se cacher leur mort en rêvant qu’elles se promènent dans un magnifique jardin, de plus en plus beau et de plus en plus fleuri, et avoir une impression de bonheur et de plénitude. Mais ces fleurs qui se développent sont certainement le symbole des cellules cancéreuses qui augmentent.  Le cancer peut aussi être codé par un amoncellement d’animaux agressifs qui, là encore, représentent les cellules cancéreuses, et dans ce cas-là, le patient se sent vraiment agressé. C’est un travail passionnant d’essayer d’expliquer le rêve pour que la personne puisse guérir.

L’analyse des rêves peut-elle participer à la prévention de la maladie ?

Une personne qui suit une psychothérapie, et dont le cancer commencerait à surgir peu après, a probablement senti la maladie venir. Parfois la psychothérapie n’a pas eu le temps de faire effet, et la personne n’aura donc pas eu le temps d’enrayer la maladie pour qu’elle ne se manifeste pas. Souvent, quand le patient développe une maladie, le psychologue la voit arriver.

Est-ce qu’il existe des études cliniques sur les rêves des personnes atteintes du cancer ?

Pour que ce travail puisse avoir lieu, il faudrait que la société pense qu’il est utile.

 

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