Faut-il appréhender le recueil des données de santé ?

Système de santé
Faut-il appréhender le recueil des données de santé ?

Les patients sont souvent approchés par des structures qui cherchent à collecter des données de santé. Si certains les partagent volontiers, d’autres sont plutôt méfiants. D’où l’importance de faire preuve de pédagogie pour expliquer que l’exploitation des données de santé est porteuse d’énormes progrès.

Par « données personnelles de santé », on désigne les informations rassemblées lorsque des patients bénéficient de soins ou pratiquent des examens médicaux. Ces informations peuvent aussi être collectées par la Caisse d’Assurance Maladie, des établissements de recherche, des associations de patients… Ces dernières sont tout à fait légitimes et de mieux en mieux formées pour cela. « Pour produire de nouvelles données ou travailler sur celles déjà existantes, nous définissons en premier lieu les objectifs de l’enquête menée et identifions ce que l’on souhaite mesurer », soulignait Anne Duburcq, directrice santé publique chez CEMKA. Il ne s’agit pas de reproduire des données existantes mais plutôt d’apporter des informations complémentaires : « Il faut bien réfléchir à la cible de l’enquête. Vise-t-on plutôt le grand public ? Les adhérents d’une association ? Cette phase préparatoire se termine par la rédaction d’un protocole qui décrit les objectifs de l’étude, sa méthodologie… ».

Un process très encadré

Le processus de recueil est en effet extrêmement bien encadré. Depuis l’entrée en vigueur du règlement général sur la protection des données (RGPD), en mai 2018, les données collectées doivent se limiter au strict nécessaire au titre des activités de prévention, de diagnostic et de soins. La CNIL rappelle cette obligation, tout en précisant que : « seules certaines personnes sont autorisées, au regard de leurs missions, à accéder à celles-ci ». À savoir également : les données de santé ne peuvent être conservées que pour une durée limitée, et les patients doivent être tenus informés sur le traitement qui peut en être fait pour leur prise en charge. « On note une plus grande responsabilisation des acteurs qui produisent des données dans l’objectif d’une meilleure traçabilité et sécurité, mais aussi un très grand respect du droit des personnes », ajoute Anne Duburcq.

L’objectif : faire avancer la recherche et améliorer la qualité de vie

Mélanie est atteinte d’une sclérose en plaques. Elle sait que le fait de partager ses données peut contribuer à faire avancer la recherche et n’hésite pas à échanger des informations sur son état de santé avec l’Institut du Cerveau et de la Moelle épinière ou la fondation ARSEP… « En revanche, je souhaite être informée des études menées et des progrès réalisés grâce aux informations que j’ai fournies. Certes, les patients sont informés de l’usage qui peut être fait des données, car c’est une obligation, mais en revanche, on ne nous tient pas toujours assez au courant des conclusions qui en sont tirées », précise-t-elle.

D’autres patients sont plus frileux. Pascal est atteint d’un cancer et a déjà été approché pour des enquêtes. Beaucoup plus méfiant, il appréhende d’être discriminé pour l’accès à des prêts bancaires… Force est de reconnaître qu’en France, les citoyens sont très attachés à la notion de secret en ce qui concerne leur état de santé, d’où une grande réticence sur ces sujets. Certains redoutent même une « marchandisation » de leurs données. Pourtant, l’objectif n’est pas du tout de vendre ces informations, mais de faire avancer la recherche et d’améliorer la qualité de vie. La preuve qu’il reste beaucoup de sensibilisation à mener. C’est l’une des missions du Health Data Hub qui informe les citoyens des projets menés et de leurs droits vis-à-vis des données.

Caroline Guillot a rejoint cette structure depuis juin 2020. Au préalable, elle a mené des projets d’études, notamment pour la Fédération Française des Diabétiques afin de comprendre comment elle pouvait être utile aux patients et améliorer leur qualité de vie. « Recueillir de la donnée, cela consiste à aller voir les patients, mener avec eux des entretiens individuels mais aussi faire des focus groupes, les écouter », explique-t-elle. Dans le cadre d’études qualitatives, elle a monté quelques questionnaires, non pas « cliniques », mais orientés « expérience patient ». Il s’agissait d’évaluer la qualité de vie, le vécu, la satisfaction par rapport à un dispositif médical… Le fait de réaliser ces questionnaires lui a permis de mieux analyser les attentes des patients.

Si la Grande-Bretagne et les pays nordiques sont très en avance en termes de collecte et d’exploitation des données, la France, outre une approche très « éthique » de ces sujets, détient l’une des plus grosses bases de données de santé au monde : celle de l’Assurance Maladie. L’ambition est de la mettre à disposition pour accélérer la recherche et les études cliniques. De manière plus générale, la collecte de données, si elle est bien traitée, permet d’améliorer la prévention en détectant mieux les signaux faibles et d’anticiper d’éventuelles rechutes. C’est l’opportunité de mieux suivre les patients, mais aussi de connaître les traitements qui ont tendance à être les plus efficaces… Les données sont collectées de façon bienveillante et dans le respect des droits des patients, et contribuent à dessiner la médecine de demain. Il ne reste plus qu’à le faire savoir…

M-FR-00006589-1.0 – Établi en avril 2022

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