Lors des premiers rendez-vous amoureux, à quel moment est-il le plus opportun de parler de sa maladie et comment s’y prendre? Nous avons recueilli le témoignage de quelques patients pour connaître leurs avis sur la question.
Priscilla, 38 ans, a choisi d’annoncer la couleur dès le premier rendez-vous. « J’ai échangé avec un homme récemment, par le biais d’un site de rencontres. J’avais bien conscience que si je lui disais trop tôt, lors des premiers échanges virtuels, il ne donnerait pas suite », explique-t-elle. Néanmoins, dès le premier rendez-vous en face à face, elle glisse dans la conversation qu’elle a subi des traitements pour un cancer. « Mon médecin m’a informé que j’avais une épée de Damoclès au-dessus de la tête. Il ne me semble pas honnête d’attendre qu’une relation avec un homme se solidifie pour partager cette information. Et puis, cela permet de faire le tri entre ceux qui potentiellement seront dans une attitude de soutien, et ceux qui fuient d’emblée », analyse-t-elle. Et des fuyards, il y en a eu plus d’un ! Priscilla parvient à ne pas se formaliser, et prend la chose avec beaucoup de philosophie car cela lui permet d’évacuer rapidement ceux qu’elle juge indignes d’une relation. « Bien sûr, je ne parle pas de la maladie à peine assise dans un bistrot, mais au fil de la conversation, au moment où on se livre l’un et l’autre sur notre vie, je raconte mon histoire. Souvent, les hommes ne savent pas très bien quoi dire et sont décontenancés. Dans une certaine mesure, cela a valeur de test », ajoute-t-elle.
Pour Louise, en revanche, pas question d’aborder ce chapitre trop en amont. Et si elle pouvait même faire carrément l’impasse, elle préférerait. « Mon cancer, ma chimio et la traversée du désert qui s’en est suivie ont été des épisodes très traumatisants. Il est toujours très douloureux pour moi de les évoquer », témoigne-t-elle. La seule fois où elle a tenté de le faire avec un homme, la réaction manifestée a été telle qu’elle s’est promis de ne pas recommencer. « Je rêverais de ne pas avoir à le dire. Pour moi, cela appartient au passé. À ma vie d’avant. Quand j’entame une histoire sentimentale, j’ai envie d’ouvrir un nouveau chapitre, vierge de toute blessure », explique-t-elle, avec des trémolos dans la voix. Mais elle sait aussi que si la maladie fait partie de sa vie passée, elle peut avoir des conséquences dans le futur. « J’ai beaucoup réfléchi à la question car je suis avec un homme depuis quelques mois. S’il m’arrive de nouveau quelque chose, il pourrait m’en vouloir de ne pas lui avoir tout dit, sans compter qu’on n’est pas à l’abri d’une indiscrétion de l’entourage », observe-t-elle. À ses yeux, le cancer est “un affreux démon qui ne disparaît jamais complètement, et qu’il faut toujours ressortir du placard, même quand on voudrait l’y laisser ad vitam eternam”.
Ce démon, Didier, lui, a appris à l’apprivoiser. « Je suis d’un naturel discret et je ne parle pas beaucoup. Encore moins de moi », précise-t-il. Quand il a rencontré Sonia, avec laquelle il vit désormais, il a choisi de jouer la carte de la transparence. Mais il a tout de même attendu pour cela que leur histoire devienne suffisamment sérieuse. « Au bout de trois mois, elle a parlé d’emménager ensemble. J’ai attendu le moment qui m’a semblé le plus opportun, un jour où nous étions tous les deux sereins. Et j’ai raconté ce que j’avais traversé. Elle a été exceptionnelle de par son écoute et son soutien. Cela m’a convaincu de faire le bon choix », raconte-t-il. Avant de la rencontrer, il a eu plusieurs « aventures », dans le cadre desquelles il lui semblait complètement décalé et non pertinent de faire part de ses soucis de santé. En résumé, même s’il n’y a pas de vérités dans l’absolu mais une vérité pour chacun, cela a du sens d’attendre le bon moment, et surtout, la bonne personne !