Tabac et diabète : un bien mauvais ménage

Diabète
Tabac et diabète : un bien mauvais ménage

Le tabagisme favorise et aggrave le diabète de type 2 caractérisé par une hyperglycémie chronique. Médecins généralistes, endocrinologues, diabétologues, tabacologues et autres professionnels de santé, tous s’accordent à le dire.

Principalement dû à un état de résistance à l’insuline et associé au surpoids, le diabète de type 2 représente 90 % des cas de diabète. La corrélation « négative » entre tabagisme et diabète affecte en réalité tous les diabétiques fumeurs, sans exception, y compris les patients atteints par les autres types de diabète. En altérant la sensibilité à l’insuline et sa sécrétion, la nicotine provoque des hyperglycémies et expose le patient à toutes sortes de complications vasculaires.

« Fumer tue », « L’exposition au tabac est dangereuse pour la santé », « Fumer nuit gravement à votre santé » ! Les messages de santé publique, volontairement provocateurs, s’affichent sur presque tous les paquets de cigarettes. L’information qui veut que le tabac expose tous les fumeurs à de nombreux risques sanitaires ne fait pas figure de nouveauté scientifique. Celle du lien entre consommation de tabac et aggravation des conséquences du diabète (risque accru de complications micro et macro-vasculaires) non plus d’ailleurs.

Depuis les années 90, il est ainsi clairement admis que tabac et diabète ne font pas bon ménage. « Si le surpoids est un des premiers facteurs de risque des maladies cardio-vasculaires, il est démontré que le duo tabac et diabète vient aggraver ces risques. Une chose est sûre : chaque cigarette est dangereuse. Même un petit tabagisme de 1 à 3 cigarettes présente un risque pour le fumeur. Si bien que le bénéfice de l’arrêt du tabac est quasi instantané. En réalité, cela dépend surtout du profil génétique des patients et des facteurs de risque associés dont le diabète fait partie », prévient le Dr Marion Adler, tabacologue à l’Hôpital Antoine Béclère de Clamart (Hauts-de-Seine) et membre du Comité scientifique et du conseil d’administration de la Société Francophone de Tabacologie. N’en déplaisent à celles et ceux qui prêtent des vertus fantasmées (ou avérées) à la nicotine, à la cigarette ou au tabac en général (antistress, coupe-faim, aide à la concentration…). Et s’il n’y a pas plus de fumeurs chez les personnes diabétiques que dans le reste de la population, les conséquences de la cigarette sont logiquement plus dangereuses pour les personnes malades.

Un surpoids lié au syndrome de manque

Pour les diabétiques comme pour le reste de la population, le bénéfice-risque (si tant est qu’il y ait un bénéfice à fumer) est incontestablement en défaveur du tabac. Une inéquation qu’il importe de rappeler vivement aux personnes fumeuses diabétiques qui craignent, pour certaines, de céder à l’appel des sucreries et de tomber en surpoids voire dans l’obésité dès qu’elles arrêteront de fumer. « La nicotine, substance provoquant l’addiction au tabac, impacte le bilan énergétique de l’organisme. Chez le fumeur, elle augmente les dépenses (200 kcal par jour en moyenne pour un paquet) et coupe l’appétit. À l’arrêt du tabac et donc de l’apport de nicotine, c’est l’inverse qui se produit : les dépenses énergétiques diminuent et d’irrépressibles fringales font gonfler les apports caloriques. Le fumeur en manque prend du poids ! Le syndrome de manque entraîne également du stress, de l’anxiété, de la nervosité… C’est pourquoi je déconseille un sevrage sans nicotine qui peut entraîner un risque plus grand pour le patient de prendre du poids, d’être mal dans sa peau et dans sa tête. »

Il est possible de plutôt recourir aux médicaments utilisés dans la dépendance à la nicotine tout en favorisant une activité physique agréable comme la marche ou le vélo d’appartement pour dépenser ses calories. En premier lieu, et tout au long de son sevrage, il faut se faire accompagner par un professionnel.

La réalité de la cigarette « coupe-faim » est, quoi qu’il en soit, plus complexe à appréhender et cette explication, aussi scientifique soit-elle, ne peut justifier la consommation de tabac tout aussi dangereuse que l’obésité pour la personne diabétique.

Plus vous fumez, plus votre risque augmente

Au moment d’étudier plus en détail la relation entre diabète et tabac, une question s’impose rapidement : le tabac est-il un facteur d’apparition du diabète ou « juste » un accélérateur d’aggravation des complications liées au diabète ? Les deux semblent indiquer la littérature scientifique et les études épidémiologiques qui traitent du sujet. En effet, sans constituer l’élément déclencheur du diabète, le tabagisme actif serait une des causes possibles d’apparition de la pathologie de type 2, chez les femmes comme chez les hommes. Le risque de développer un diabète de type 2 passerait ainsi de 37 % à 44 %*. De manière générale, le risque de développer du diabète (tous types confondus) est deux à trois fois plus élevé chez les fumeurs. La nicotine altérant la sensibilité à l’insuline et sa sécrétion. Et une fois le diabète installé, la cigarette continue de nuire à la santé du diabétique.

« À l’inverse, l’arrêt progressif du tabac semble se traduire par une courbe de risque décroissante, proportionnellement au nombre d’années sans tabac. Ainsi, plus l’arrêt serait précoce, et plus la réduction du risque serait importante. Ceci étant dit, il faut rester très prudent concernant ces affirmations, car à l’heure actuelle, l’effet de l’arrêt du tabac sur le contrôle du diabète et des complications associées sont peu étudiés », avance la tabacologue. Pour résumer : plus vous fumez, plus les risques augmentent ! La faute à qui/à quoi ? Au tabac, qui majore deux phénomènes : l’intolérance au glucose et dans le même temps la perte de sensibilité à l’insuline.

À chacun sa méthode pour arrêter de fumer

La solution semble donc évidente pour la personne diabétique : ne jamais fumer ou arrêter pour constater un mieux-être au quotidien. Ce mieux-être se traduit par une amélioration immédiate des capacités respiratoires, une meilleure perception du goût des aliments, une diminution de la nervosité et du stress, une amélioration de l’humeur et des capacités de concentration, mais aussi par une activité physique facilitée… « La reprise de l’activité physique est d’autant plus facile que l’on retrouve très vite son souffle et l’envie de bouger. En associant un médicament utilisé dans la dépendance à la nicotine à une pratique physique plaisante, il est réellement possible d’arrêter de fumer sans prendre de poids ! Certains de mes patients ont en même perdu », affirme le Dr Adler.

Arrêter de fumer serait donc la panacée. Simple à dire, plus compliqué à mettre en action pour le fumeur malade. C’est là qu’entrent en jeu plusieurs solutions favorisant le sevrage tabagique. Impossible de toutes les passer en revue. « Tout dépend du contexte et de votre profil génétique et de fumeur, de vos antécédents, de votre niveau de dépendance à la nicotine… Dans un premier temps, il est indispensable de faire le point sur votre rapport au tabac et mieux comprendre votre dépendance pour mieux la maîtriser. Sur cette base, en concertation avec un professionnel de santé (tabacologue, médecin spécialiste, généraliste…), le patient diabétique fumeur adoptera un traitement adapté à la situation. »

L’objectif premier est de mettre en place un sevrage en douceur, sans provoquer une sensation de manque, qui est difficile à vivre pour le patient et qui le fait souffrir. Encore une fois, il s’agit d’arrêter sans souffrance.

*Diabète et Obésité (mars-avril 2019, vol.14, numéro 123) : Diabète et tabagisme-Liaisons dangereuses

M-FR-00006616-1.0 – Établi en avril 2022