Laurence et Rodolphe Viémont sont bipolaires. Ils s’aiment depuis sept ans et combattent ensemble la maladie. Rodolphe a choisi de filmer sa femme pour en parler, dans le cadre d’un film très émouvant, baptisé Humeur liquide.
A travers son parcours difficile, elle nous raconte ses états d’âme et se livre avec pudeur. Comme 1% de la population, Rodolphe et Laurence sont tous deux atteints de « troubles de l’humeur ». Ils passent d’un état dépressif où ils se laissent aller et sombrent jusqu’aux idées suicidaires à un état euphorique et excessif, la manie, où tout leur semble possible.
Mais l’un comme l’autre sont dans un modèle dit « mixte », autrement dit manie et dépression se mêlent. Leurs périodes d’excitation les plongent dans de grandes souffrances morales. Quand Rodolphe est en dépression, Laurence souffre et vice versa. Leur instinct de survie et surtout leur amour les sauve. En théorie, il y a une chance sur mille que deux bipolaires mixtes se rencontrent. Eux ne croient pas au hasard…
Ils ne sortent jamais de chez eux sans neuroleptiques, et suivent des traitements longs et difficiles pour réguler leur humeur. Quant aux antidépresseurs, ils sont une aide précieuse dans la thérapie.
Le couple vit avec la peur de la maladie comme une épée de Damoclès au dessus de la tête, car la bipolarité peut être étouffée, les cycles atténués mais elle n’est pas vraiment soignable.
Les bipolaires ne sont ni lunatiques ni fous. Pendant les phases de manie leur état est incontrôlable et peut mener à une hospitalisation s’il ne s’améliore pas en quelques jours. 50% des bipolaires font une tentative de suicide. 30% la réussissent.
Les médecins et psychanalystes interrogés dans le film de Rodolphe estiment que l’histoire personnelle d’un patient, son environnement, sa façon de réagir à des événements depuis sa naissance jouent un rôle conséquent dans les crises. Ainsi, l’enfance de Laurence, constituée à la fois de silences et de crises pourrait expliquer en partie sa maladie. Un divorce, une anorexie, des désordres psychiatriques dans la famille : l’origine de ses souffrances se dévoile peu à peu.
Après des années de psychothérapie, Laurence sait désormais identifier les situations qui peuvent déclencher la manie et la dépression. Elle a appris à les anticiper, à mieux les gérer, et donc à éviter le basculement dans la dépression ou la manie.
Le Docteur Pascal Lévy se montre même optimiste et propose parfois à ceux de ses patients qui vont bien d’arrêter les traitements au bout de cinq ans si leur vie professionnelle et affective semble stable.
Dans ce désordre, le couple rêve pourtant d’avoir un enfant. Mais comment l’élever quand les deux parents sont bipolaires ?
Les médecins encouragent le couple dans ses projets. Selon le Professeur de psychiatrie Franck Bellivier, même s’ils ont 30% de risques d’avoir un enfant bipolaire, cela ne doit pas les empêcher de fonder une famille. Laurence, elle, n’a pas peur. Elle pense que si un enfant arrive, il n’y aura plus de place pour la maladie dans leur vie. Reste à souhaiter que ses espoirs rejoindront la réalité !
A noter, la voix-off a été écrite par Rodolphe Viémont et interprétée par Robinson Stévenin. Pudique et élégant, innervé de douceur et d’amour, ce film devrait, aux yeux du psychanalyste F. Cloaraec, « aider les gens qui se posent des questions ». Il a aussi le mérite de traiter des sujets trop rarement abordés.
