Ma vie quotidienne

Quels sont les bouleversements psychiques liés à une maladie ?

Diabète, endométriose, maladie de Crohn… ces maladies ont souvent des conséquences sur la santé mentale des patients. Rencontre avec Marie de Bonnières, psychologue clinicienne et autrice du livre Mieux vivre avec une maladie chronique (Editions Larousse).

 

Vivre avec une maladie chronique, c’est voir son quotidien être impacté par les traitements, la douleur, les rendez-vous médicaux et toutes les conséquences psychologiques qui en découlent. En France, 10,7 millions de personnes sont concernées par le dispositif « Affections longue durée » de l’Assurance Maladie mais selon l’organisme, il serait bien plus nombreux, environ 20 millions, à avoir recours à des soins liés à une pathologie chronique.

Dans son livre, Mieux vivre avec une maladie chronique (Editions Larousse), Marie de Bonnières part du constat qu’on ne guérit pas de ces maladies et qu’on doit apprendre à vivre avec. « Les patients doivent renoncer à l’illusion de la guérison et apprendre à vivre avec cette maladie. Tout dépend de chaque personne mais en général, c’est assez compliqué », précise-t-elle.

Une vie souvent chamboulée

Dès l’annonce du diagnostic, la vie du patient est impactée.

C’est un choc très fort. D’abord, c’est l’intégrité physique qui est menacée. Sans être forcément confronté directement à l’idée de la mort, la personne malade est confrontée à l’idée d’une certaine finitude », explique Marie de Bonnières.

La maladie entraîne aussi une perte de repères. « C’est l’effondrement d’un monde qui n’existera plus », décrypte-t-elle. L’impact physique et physiologique vient modifier le quotidien : « Le rapport à soi, à son corps et aux autres n’est plus du tout le même. Il n’est plus forcément possible d’avoir les mêmes activités physiques, sociales ou professionnelles qu’avant. La réalité du patient devient différente de celle des autres et il doit parfois se confronter à des jugements de valeurs. Cela peut entraîner de la culpabilité et un isolement ».
La maladie risque aussi de balayer les projets des patients comme un voyage, une évolution professionnelle, ou encore un désir d’enfant.

Apprendre à vivre « avec »…

Pour autant, le diagnostic d’une maladie chronique ne signifie pas que la vie du patient est terminée. Il faut donc apprendre à vivre avec la maladie, changer ses habitudes et cela n’est pas toujours facile à accepter.

Marie de Bonnières compare le processus d’intégration de la maladie au deuil : « C’est un peu les mêmes étapes : déni, colère, marchandage, dépression puis acceptation. L’acceptation arrive au terme d’un processus long, singulier et non linéaire. Le cheminement est différent pour chacun, il dépend de la nature de la pathologie, de son évolution, de la manière de la traiter. L’acceptation passe entre autres par le fait de prendre soin de soi physiquement et psychologiquement, par le fait de trouver du soutien, auprès de professionnels, d’autres malades ou de proches, et par le fait de bien se connaître. Une bonne connaissance des symptômes, de ce qui les déclenche ou les atténue, ainsi qu’une bonne connaissance de ses ressources, des activités (sociales, artistiques, culturelles, sportives…) qui font du bien permettent progressivement de mieux vivre avec la maladie. »

La thérapeute explique qu’une maladie chronique, c’est un rapport cyclique au temps avec des périodes de grandes douleurs, de fatigue mais aussi des moments où cela va mieux :

le temps est le meilleur allié pour s’adapter à cette nouvelle manière d’être avec la maladie. », analyse Marie de Bonnières.

Une alimentation et une activité physique adaptée jouent également un rôle dans le bien-être quotidien.

… grâce à un bon accompagnement

Pour prendre soin de soi, l’accompagnement médical est nécessaire. Il faut d’abord se rapprocher d’une équipe médicale spécialisée, en laquelle le patient a confiance. Cette notion de « confiance » est tout à fait primordiale, car il en va de sa vie. Le fait d’être suivi par un psychologue permet également de mieux comprendre et d’accepter ses émotions liées à la maladie.

« C’est important de parler à quelqu’un qui n’est pas un proche car les malades ont souvent peur d’embêter leur famille, leurs amis. La parole permet de se réapproprier son vécu, de récupérer son intégrité physique et psychique ou encore de prendre du recul. Le psychologue permet d’aider à nommer les émotions et les écouter. Lorsque l’on est atteint d’une maladie chronique, il est primordial d’apprendre à ne pas culpabiliser et de déconstruire l’idée que la maladie est une responsabilité individuelle », ajoute Marie de Bonnières.

Au-delà du corps médical, les proches représentent néanmoins un soutien important.

Ils doivent savoir écouter et oser poser des questions. Mais aussi savoir se taire et ne pas juger », insiste la psychologue.

Certaines personnes ont tendance à donner des conseils non sollicités alors que l’idéal reste d’être présent en proposant d’accompagner à un rendez-vous médical, de cuisiner un repas, de garder les enfants une après-midi ou encore de faire des courses. Rester à sa juste place n’est pourtant pas si simple quand on est très impliqué et soi-même dépassé par ses émotions. Autrement dit, pour les aidants aussi, un soutien peut s’avérer précieux…

M-FR-00012133-1.0 – Établi en août 2024

Karine Diakite

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