Faut-il s’inquiéter de défauts d’attention et d’oublis occasionnels ? Quand faut-il considérer qu’il s’agit de réels troubles de la mémoire ? Le processus cérébral en jeu dans la mémorisation de l’information et sa restitution à plus ou moins long terme est complexe. Célia Mores, docteur en neurosciences, nous explique ce qu’il en est, distillant au passage ses conseils pour optimiser sa mémoire ou, a minima, préserver ses capacités mnésiques.
« Perdre la tête », Souffrir de trous de mémoire », « Avoir la mémoire qui flanche », « Avoir une mémoire de poisson rouge »… Ces expressions populaires montrent l’intérêt porté aux troubles affectant la mémoire, sachant qu’elle est au cœur des comportements quotidiens. Et surtout les troubles qui lui sont associés sont très anxiogènes. Beaucoup de personnes y voient d’emblée la préfiguration d’un vieillissement inéluctable, ou pire encore, les prémisses de troubles neurocognitifs du type Alzheimer ou maladies apparentées.
Faut-il systématiquement consulter un professionnel de santé quand on a des raisons de penser que la mémoire nous fait défaut ? » Il peut être pertinent dans un premier temps de stimuler régulièrement son cerveau pour préserver ou renforcer ses performances mnésiques ! « Si j’occulte la dimension clinique du cerveau et les pathologies dont il peut être victime, il est aujourd’hui démontré que nous ne sommes pas tous égaux devant le processus de mémorisation. Ce processus dépend ainsi du fonctionnement physiologique de notre cerveau et du terrain génétique propre à chacun. Par ailleurs, certaines personnes ont une mémoire sélective plus prononcée et ne vont prêter vraiment attention qu’à un seul type d’informations quand d’autres informations, secondaires à leurs yeux, ne seront pas mémorisées. Seul l’entraînement du cerveau, plus précisément la stimulation de la mémoire, permet d’optimiser le processus de mémorisation », avance Célia Mores, docteure en neurosciences et chargée, entre autres, d’enseignement à l’École de diététique et nutrition humaine (EDNH).
Fonction essentielle du cerveau, la mémoire est notre capacité à enregistrer des informations afin de les récupérer si besoin pour s’en servir à titre personnel (ou professionnel) et / ou les transmettre à un tiers. La mémoire nous définit en tant qu’individu. Ainsi, il y a des personnes ayant une mémoire visuelle, quand d’autres ont davantage la mémoire des chiffres ou des mots ». « Contrairement aux idées reçues : les styles d’apprentissage n’existent pas. De plus, les représentations imagées sont mieux retenues. On retient mieux des images que des mots… Par ailleurs, la mémoire nous procure des sentiments contradictoires, des bons souvenirs ou, au contraire, les souvenirs d’événements plus douloureux. Elle nous surprend aussi avec le retour à la surface d’événements qu’on pensait avoir oubliés et qui ressurgissent à la vue d’un objet ou à l’écoute d’un son… Parfois, enfin, elle nous joue des tours et nous fait défaut », explique celle qui officie également en tant que chroniqueuse sur Nutriradio où elle anime une émission baptisée La sphère neuro. Elle y aborde notamment les processus mentaux impliqués dans l’attention, la prise de décision, le comportement alimentaire… ou encore la mémoire. L’occasion de mettre en lumière toute la complexité du processus de mémorisation. Une complexité inhérente aux trois étapes dites essentielles de la mémorisation. Des étapes à respecter pour qui entend maximiser ses chances de « se souvenir »… La première tient en l’encodage de l’information. Comprenez le placement de l’information dans le cerveau. Sans cet encodage, impossible d’enregistrer et donc d’espérer pouvoir restituer un jour l’information. Mais pour encoder l’information, encore faut-il y prêter attention. Enfin presque puisque, en parallèle de l’encodage dit « intentionnel » (ex. L’étudiant qui travaille à mémoriser ses cours), il existe l’encodage « non intentionnel » (ex. enregistrer les visages des personnes présentes dans une salle d’attente de manière involontaire). Deuxième étape : le stockage de l’information placée dans le cerveau et sa conservation à long terme. La troisième étape consiste à récupérer et restituer le plus précisément possible l’information enregistrée (ex. l’étudiant répondant aux interrogations lors d’un examen). « À chacune de ces étapes, des problématiques peuvent survenir et entraîner la perte de l’information. D’où l’importance de travailler à optimiser l’encodage, le stockage et la récupération des informations. En clair : entraîner son cerveau à enregistrer une information puis à aller la rechercher », résume Célia Mores.
Que chacun se rassure : des oublis occasionnels ne constituent pas une fatalité et ne sont pas toujours synonymes d’une pathologie affectant le cerveau. Pour réduire « les défaillances » dans la mémorisation, le cerveau se doit d’être stimulé. En premier lieu, grâce à une alimentation adaptée, riche en omégas 3 et en certains types d’acides aminés comme la tyrosine et la choline qui permettent la synthèse des neurotransmetteurs, comme la dopamine, et l’acétylcholine qui sont impliqués dans la mémoire, la vigilance, les apprentissages… Les premiers constituent des acteurs-clés dans la synthèse d’acétylcholine, neurotransmetteur impliqué dans la mémorisation. Tandis que les seconds jouent un rôle fondamental dans la neurogénèse (croissance neuronale), et plus précisément dans la formation de synapses (connexions entre les neurones). L’activité physique est également, à en croire les résultats de nombreuses études, étroitement liée à la performance du processus de mémorisation. Nous parlons bien d’activité physique et non pas de sport. Marcher 30 à 45 minutes par jour et toute la réflexion menée durant ladite activité suffit à stimuler le cerveau. Pas besoin de devenir un sportif accompli », tempère-t-elle. La qualité et la quantité du sommeil sont, enfin, à prendre en compte. Il est ainsi avéré que dormir 30 minutes supplémentaires par nuit augmenterait sensiblement les performances mnésiques des étudiants. Veiller à avoir un sommeil de qualité et en quantité favorise donc les apprentissages qui se font en grande partie pendant le sommeil paradoxal. « Si je fais abstraction des paramètres génétiques, il est intéressant de noter que celui qui a une bonne hygiène de vie, au travers de l’activité physique, l’alimentation et le sommeil, maximise ses chances d’avoir une bonne mémoire », en conclut Célia Mores. Celui qui exerce directement son cerveau aussi… C’est un fait : le cerveau stimulé va multiplier, au gré des apprentissages, les connexions neuronales. Ne reste plus ensuite qu’à les préserver. Comment ? En s’adonnant à des jeux spécifiques (mots fléchés, sudoku, quiz etc.) ; en faisant preuve de curiosité culturelle par la lecture, la visite d’expositions, les voyages… ; en multipliant les liens sociaux synonymes d’échanges enrichissants… Sans oublier les « fameuses piqûres de rappel » et cette nécessité de régulièrement se « remémorer » d’anciennes informations enregistrées afin d’éviter leur destruction dans le temps. Efficaces pour préserver le plus longtemps possible sa mémoire, ces « solutions » n’empêchent pas pour autant le processus de vieillissement cellulaire et de déclin cognitif qui affecte aussi le cerveau, et le rendent à terme moins performant.
M-FR-00013688-1.0 – Établi en mars 2025
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