Alors que s’achève Mars Bleu, le professeur Ducreux, oncologue à l’institut Gustave Roussy, revient sur l’importance de la sensibilisation.

Parle-t-on assez du cancer du côlon ?

Malheureusement trop peu car le sujet est tabou. C’est presque plus facile d’évoquer une mammographie qu’un test consistant à prélever ses selles. Récemment, nous avons parcouru la région parisienne avec un camion bleu pour prêcher la bonne parole, dans le cadre d’une initiative de l’IGR, et j’ai constaté que les gens n’avaient jamais entendu parler de l’opération Mars Bleu. De la même façon, nous avons organisé un conseil d’administration récemment et j’ai distribué le ruban bleu au préfet, aux représentants de l’Inca… Les gens portent plus volontiers le ruban rouge propre à la lutte contre le sida.

Avez-vous le sentiment que les Français sont sensibles aux messages de sensibilisation ?

Pas vraiment, d’abord parce que le test n’est fiable qu’à 50%, ce qui est mieux que rien. Mais aussi pour des raisons d’image. Et puis c’est une maladie qui fait peur, donc ils ne sont pas disposés à entendre. Qui dit coloscopie dit anesthésie et préparation la veille, ce qui peut être assez anxiogène. Par ailleurs, les symptômes sont assez banaux : mal de ventre, troubles digestifs… On les associe à tort à du stress, à un décalage horaire… Le sang dans les selles pourrait alerter mais d’abord tout le monde n’y prête pas attention et en plus, certains cancers ne saignent pas.

Pourtant un dépistage précoce permettrait de réduire considérablement la mortalité ?

Absolument.  Si on atteint 50% de retour de plaquettes, on peut faire chuter la mortalité de 12%. Sur 42 000 nouveaux cas par an en France, ce n’est pas rien. Pendant 5 à 10 ans des tumeurs bénignes peuvent pousser puis se cancériser.

La maladie évolue-t-elle ?

Elle évolue en nombre, compte tenu du vieillissement de la population d’une part et des mauvaises pratiques alimentaires d’autre part. Manger gras est un facteur de risque. La viande rouge n’est pas vraiment recommandée non plus. En revanche, il faut privilégier les fibres et les viandes blanches ou mieux encore le poisson. Il y a aussi bien sûr des facteurs environnementaux, comme l’alcool, le tabac, mais aussi des modes de vie trop sédentaires. Il est recommandé de pratiquer une demie heure de marche rapide chaque jour, de monter les escaliers plutôt que de prendre l’ascenseur et de pratiquer une heure de sport intensif le week end. Très peu de gens suivent à la lettre ces recommandations.

Que recommandez-vous donc ?

De continuer à prêcher la bonne parole. Nous sommes intervenus dans des entreprises pour diffuser nos messages. Il faut que les Français prennent à bras le corps les problématiques de dépistage, mais aussi qu’ils dédramatisent la maladie car elle peut être guérie. Les traitements ont beaucoup évolué avec les thérapies ciblées notamment, mais aussi les progrès de la chimio. Aujourd’hui, le taux de guérison est passée à 60% contre 45% il y a 20 ans. C’est encourageant !

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