Cancers

Cancer de la prostate et testostérone : des chercheurs démontent les idées reçues

Depuis près de 80 ans, les experts imputent ce cancer à un excès de testostérone. Selon une récente étude française, il se pourrait que ce soit en réalité l’inverse…

Le cancer de la prostate est le plus fréquent en France. Chaque année, on compte plus de 50.000 nouveaux cas 1. Et il est l’un des cinq cancers les plus meurtriers !

 

Des croyances largement ancrées…

 

Parce que la testostérone était considérée comme la cause principale de ce cancer, beaucoup de malades ont été castrés chirurgicalement ou de façon hormonale. Charles Huggins, l’un des premiers à avoir initié ce type de traitements, avait reçu le Prix Nobel de médecine en 1966 pour ses travaux sur l’hormonothérapie. Ce qui explique que ses réflexions aient mis si longtemps à être remises question. Il n’y a d’ailleurs pas lieu de les discréditer car elles portaient toutes sur les cancers métastatiques, lesquels ne représentent plus aujourd’hui que 10% des cas, grâce aux progrès thérapeutiques.

 

… et qui commencent à être réenvisagées

 

Des recherches plus actuelles apportent un nouvel éclairage. Les équipes du professeur Henry Botto, ancien chef du service d’urologie de l’Hôpital Foch, ont publié leur étude dans la revue Hormones and Cancer. Baptisée Androcan, cette dernière se base sur les cas de plus de 1.300 hommes qui s’apprêtaient à être opérés d’un cancer de la prostate localisé, c’est-à-dire sans métastase. Leur niveau de testostérone a été mesuré, or il s’avère que la moitié de ceux ayant un déficit de testostérone présentaient une forme agressive du cancer, alors que celle-ci ne concernait que 30% des autres participants à l’étude.

 

Vers une remise en cause de certains traitements ?

 

À l’heure actuelle, on a tendance, compte tenu des croyances qui prévalaient jusqu’alors, à administrer aux hommes pris en charge pour un cancer de la prostate des traitements anti-hormonaux visant à bloquer la production de testostérone. Mais les effets secondaires ne sont pas anodins (troubles de l’érection, prise de poids, baisse de la densité osseuse et musculaire, risque accru de diabète et même d’Alzheimer…). Henry Botto espère que les résultats de son étude amèneront les médecins à réfléchir à la pertinence de ce genre de traitements, dans le cas du cancer de la prostate localisé. D’autres investigations sont nécessaires pour confirmer ces observations et éventuellement, à l’avenir, proposer un traitement par supplémentation en testostérone.

 
1 Incidence estimée en 2015 : https://www.e-cancer.fr/Professionnels-de-sante/Les-chiffres-du-cancer-en-France/Epidemiologie-des-cancers/Les-cancers-les-plus-frequents/Cancer-de-la-prostate

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