Voix des Patients se penche sur les travaux de l’institut Jérôme Lejeune, premier centre de soin, de recherche et de formation en Europe, spécialisé dans la trisomie 21. Les recherches qui y sont menées permettent d’améliorer la prise en charge des personnes porteuses de trisomie 21, mais aussi de réaliser des avancées thérapeutiques pour d’autres pathologies.
Le professeur Jérôme Lejeune, codécouvreur de la trisomie 21, était convaincu que le chercheur et le médecin ne doivent pas travailler séparément. Il avait comme espoir de mieux comprendre cette pathologie pour un jour, pouvoir la mettre en échec, en essayant d’améliorer les capacités cognitives des patients. Depuis sa création en 1997 par la Fondation Jérôme Lejeune, plus de 11 000 personnes porteuses de trisomie 21 ou d’un autre syndrome d’origine génétique sont suivies de la naissance à la fin de vie à l’institut Jérôme Lejeune. « Environ 80% des personnes suivies ici sont porteuses de trisomie 21 », précise le Dr Clotilde Mircher, généticienne et chef de la consultation de cet Institut.
Quand les données des patients permettent de faire avancer la recherche
Les patients viennent en moyenne un fois par an rencontrer les médecins spécialistes de l’Institut. Lors des consultations, il arrive que des prélèvements sanguins soient réalisés. Ils sont alors conservés à -150°C dans le Centre de Ressources Biologiques de l’Institut Jérôme Lejeune. Ils seront ensuite utilisés dans les programmes de recherches. « Un véritable trésor pour la science », selon Sophie Durand, directrice de recherche au sein de l’Institut, « car la biobanque compte plus de 20 000 échantillons biologiques associés aux données cliniques issues des consultations ». L’étude de ces données a déjà permis de nombreuses découvertes sur la trisomie 21, mais s’est aussi révélée utile dans d’autres domaines.
« Certaines pathologies sont sur-représentées chez les personnes porteuses de trisomie 21 telles que la leucémie, les apnées du sommeil, la maladie d’Alzheimer… A l’inverse, d’autres pathologies telles que les cancers de la prostate ou du sein, ou encore les tumeurs cérébrales, sont quasi-inexistantes au sein de cette population », précise Sophie Durand.
Face à ce constat, la Fondation et l’Institut Jérôme Lejeune ont développé des projets de recherche croisée. C’est le cas par exemple du projet de recherche « trisomie 21 et cancer du sein » mené par le Professeur André Mégarbané, chercheur à l’Institut Jérôme Lejeune et professeur à l’Université américaine de Beyrouth. Ce projet repose sur le constat suivant : « Dans une population dite normale, ne présentant pas d’anomalies chromosomiques, statistiquement, 1 femme sur 8 va développer un cancer du sein dans sa vie. Les femmes porteuses de trisomie 21 n’en ont quasiment jamais ! ». Ce programme a permis d’identifier des pistes prometteuses en matière de prévention.
La recherche croisée alimente bien des espoirs
Autre exemple donné par le Dr Clotilde Mircher : « La maladie d’Alzheimer est fréquente dans la population générale mais davantage encore, et plus précocement, chez les patients porteurs de trisomie 21. Cela s’explique notamment sur un plan génétique puisque la protéine bêta-amyloïde toxique, qui s’accumule dans le cerveau des personnes malades d’Alzheimer, est produite par le gène APP qui se situe sur le chromosome 21. Les personnes porteuses de trisomie 21, qui ont un chromosome 21 supplémentaire, ont donc plus de copies du gène APP et vont produire en excès la protéine toxique bêta-amyloïde. S’il existe un médicament contre cette maladie, cela bénéficiera à nos patients et à l’inverse, si on comprend mieux la maladie grâce à ces derniers, ce que c’est, cela bénéficiera à la population générale ». Jean-Marie le Méné, Président de la Fondation Jérôme Lejeune se félicite d’avoir réussi à intéresser la communauté des chercheurs à la trisomie 21 : « ce n’était pas le cas il y a 25 ans. Les autorités estimaient préférable d’axer sur le social ou le médico-social ». L’une des grandes pistes de recherche, c’est l’approche par le génotype, autrement dit l’inhibition d’une enzyme qui serait liée à des gènes spécifiques du chromosome 21. Comme l’explique le Dr Clotilde Mircher, il s’agit de savoir quels sont les gènes du chromosome 21 responsables du déficit intellectuel et des anomalies associées : « On observe ensuite la façon dont ils fonctionnent pour les inhiber pharmacologiquement ». Elle précise que dans l’attente de traitements, une équipe médicale et paramédicale de l’Institut suit les patients au quotidien, avec plusieurs médecins spécialistes, une orthophoniste, une assistante sociale, des neuropsychologues et une infirmière. La prise en charge de la trisomie 21 est bien meilleure aujourd’hui qu’elle ne l’était il y a encore quelques années. Nous sommes aujourd’hui en mesure de diagnostiquer et de soigner certaines comorbidités – telles que la cardiopathie -, et d’améliorer grandement la qualité de vie de ces personnes. L’espérance de vie des personnes porteuses de trisomie 21 a doublé en 20 ans. Il n’en demeure pas moins qu’il reste encore beaucoup de choses à comprendre et pour cela, la recherche est en ordre de marche !
Source :
https://www.institutlejeune.org/en/research.html
M-FR-00004380-1.0 – Etabli en mai 2021