Gynécologue-obsétricien, le docteur André Nazac (cf photo) reçoit à l’hôpital Bicêtre des patientes concernées par l’endométriose et par le cancer.
Avez-vous le sentiment que les femmes sont suffisamment sensibilisées à l’importance du frottis ?
Les femmes sont sensibilisées au frottis mais peut-être pas au bon moment. Les campagnes ne sont pas assez ciblées et la sensibilisation s’avère très imparfaite. Par exemple, la vaccination devrait précéder le frottis quand elles sont jeunes filles et ensuite on devrait leur apporter une sensibilisation au frottis à l’université par exemple pour le débuter à 25 ans. Aussi, de nombreuses femmes font trop de frottis tandis que d’autres n’en font pas assez. Il faudrait faire une sensibilisation sur le bon rythme qui est le même pour tous. Sauf antécédents de lésions cancéreuses, c’est tous les trois ans. Un frottis tous les six mois, cela ne sert à rien.
Y a t il selon vous des inégalités en matière de sensibilisation au dépistage, que ce soit des inégalités sur le plan social ou géographique ?
L’organisation du dépistage ne couvre pas l’ensemble de la population. Il y a des inégalités car pour des patientes qui n’ont pas d’éducation, c’est plus délicat de comprendre ce qu’est un dépistage et sa nécessité. J’ai fait une formation à Mayotte et je peux vous dire que, concrètement, l’emplacement géographique a son importance. Il faut se déplacer dans les villages pour faire de l’information. En métropole, il faudrait sensibiliser davantage les médecins généralistes sur le bon rythme de dépistage. C’est le rôle de ceux qui suivent des femmes qui n’ont pas de gynécologue. Les généralistes devraient prescrire plus de dépistages. Tous ne le font pas. Par ailleurs, après la ménopause, un certain nombre de femmes ne consulte plus de gynécologue car en l’absence de perspective de grossesse, elles se pensent loin de tout cela. A tord. Hier, j’ai reçu une patiente de 49 ans qui n’avait jamais eu de frottis… Dans le même temps, les délais de consultation chez les gynécologues sont longs, avec, à contrario, une part importante de femmes qui les consultent peut-être trop souvent.
Qu’avez-vous envie de dire à toutes les femmes aujourd’hui, en cette journée de la femme, que ce soit à des patientes ou à des aidantes ?
Les femmes s’ouvrent rarement des difficultés qu’elles rencontrent la première fois, mais dans le suivi oui, souvent. Je veux leur dire que le corps médical est souvent plus en empathie qu’elles ne le pensent. Je veux aussi leur dire qu’il y a près de 10 % de cancer du sein avant 40 ans, donc il est nécessaire de procéder à un examen clinique par palpation des seins ou par mammographie. Même après 75 ans, il faut continuer à se faire dépister régulièrement!