À l’heure où des millions de personnes sont de plus en plus attentives aux bons comportements à adopter pour préserver leur santé, les applications et objets connectés dédiés se multiplient pour les y aider. En France, il n’est pas toujours évident d’associer prévention et e-santé pour des raisons d’ordre culturel, organisationnel et budgétaire.
Plusieurs solutions ont vu le jour pour prévenir l’hypertension, préserver son hygiène bucco-dentaire, respecter un temps de sommeil régénérateur ou encore faire face à l’obésité. On estime que près de 60 000 applications se sont déployées sur les plateformes de téléchargement (Apple Store et Google Play Store), en l’espace de quelques années.
La prévention, victime d’un système de prise en charge trop généreux ?
À cela, il convient d’ajouter tous les objets connectés de type montres ou bracelets, appelés eux aussi, à prévenir l’apparition de certaines pathologies ou à éviter certaines complications inhérentes à des maladies chroniques en mesurant notamment les données physiologiques (taux de glucose dans le sang, tension artérielle…). Sans oublier la série de capteurs pour évaluer la pollution atmosphérique ou l’intensité des rayons UV, et qui à ce titre, représentent également des moyens de prévention. Comment expliquer que l’impact de ces différents outils soit encore si fragile, notamment dans l’Hexagone ? Thomas Serval, CEO et Co-fondateur de Baracoda Daily Healthtech, a son explication. Selon lui, c’est lié à une confiance insuffisante et à un trop faible taux d’engagement. Par ailleurs, il ne faut pas perturber le quotidien des utilisateurs, et ne pas trop leur en demander, pour éviter qu’ils abandonnent. Au contraire, il faut favoriser l’engagement car à ce jour, la prévention relève plus de l’initiative individuelle que d’un processus collectif. Le sujet est d’agir pour que l’utilisation se fasse dans la durée et que chacun se l’approprie ». Son entreprise produit chaque année 2 millions d’objets connectés à utiliser dans la salle de bain. Il explique que si ses clients sont essentiellement à l’étranger, c’est en partie lié au mode de remboursement de notre système de santé : « dans l’inconscient collectif, c’est l’État qui paie pour les soins. En France, soigner une carie ne vous coûte rien puisque le soin est remboursé à 100 %. Aux États-Unis, par contre vous payez 200 dollars. Vous avez donc intérêt à les éviter ».
Des préventions secondaire et tertiaire à dynamiser
Rappelons que l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) distingue trois niveaux de prévention : la prévention primaire visant à diminuer l’incidence d’une maladie dans une population et réduire les risques d’apparition de nouveaux cas. La prévention secondaire intervenant au début de l’apparition du trouble ou de la pathologie pour freiner son évolution voire faire disparaître les facteurs de risque. Et enfin, la prévention tertiaire pour diminuer la prévalence des incapacités chroniques ou des récidives dans une population, mais aussi réduire les complications, invalidités ou rechutes consécutives à la maladie. On peut donc parler de préventions au pluriel. La stratégie n’est pas la même pour un jeune résidant à Dunkerque que pour un retraité domicilié à Menton. Or, aujourd’hui, nous avons vocation à faire de la prévention un principe uniforme. C’est une erreur », explique de son côté Erwann Tison, directeur des études au sein de l’Institut d’études Sapiens. Si la prévention primaire, relevant de la responsabilité des pouvoirs publics et centrée sur les campagnes d’informations/de sensibilisation, est relativement efficace, il n’en est rien pour les préventions secondaires et tertiaires qui gagneraient selon lui à être optimisées. Cela nécessite des actions ciblées (dans les entreprises ou dans les écoles), mais aussi des partenariats avec des institutions comme les complémentaires de santé ou des professionnels de terrain.
La prévention, une priorité nationale
Un des leviers d’amélioration réside dans le numérique qui, en intégrant des données personnelles fiables, favorisera une réponse personnalisée et adaptée. La e-santé favorise en effet la prévention, fluidifie et améliore le parcours du patient en le rendant plus personnalisé et participatif. Encore faut-il y consacrer les moyens nécessaires car le financement reste une composante essentielle d’une stratégie préventive efficiente. Les pouvoirs publics considèrent aujourd’hui la prévention comme un des axes forts de la stratégie nationale de santé. Preuve en est avec un ministère de la Santé qui a vu sa dénomination évoluer en « ministère de la Santé et de la Prévention ». À suivre…
M-FR-00012554-1.0 – Établi en octobre 2024