La maladie conduit souvent à remettre en cause des projets de vie en raison des difficultés rencontrées par les patients. Mais pour la famille Bochaton, la maladie de Charcot, diagnostiquée chez Geneviève, la mère de Surya, fut l’occasion de confirmer un état d’esprit familial résumé en deux mots : carpe diem. Pour faire connaître la maladie et collecter des fonds au profit de la recherche, Surya a créé l’association « Cordée de copains ». Prête à déplacer des montagnes, elle s’est finalement résolue à en gravir une, et pas n’importe laquelle : le Mont-blanc… Portrait d’une famille qui a choisi de se battre malgré la maladie.
C’est une histoire qui – comme bien souvent avec les récits centrés sur une maladie – déjoue tous les pronostics, les craintes comme les espoirs, les certitudes comme les doutes… Comme si les patients et leurs proches s’adonnaient à un étrange jeu du chat et de la souris avec la maladie. Objectif : cohabiter ou plutôt continuer à vivre. Surya Bochaton en sait quelque chose. Elle a d’abord pensé que les périodes de forte fatigue et les douleurs aux mains ressenties par sa mère étaient liées aux longues journées de travail et aux stigmates d’anciennes opérations du canal carpien. Mais, à y regarder de plus près, le surinvestissement professionnel de Geneviève et les heures passées devant l’ordinateur ne pouvaient pas tout expliquer, à commencer par ses troubles récurrents de l’élocution. Surya, avec son frère et son père, ont alors « parié » sur des accidents vasculaires cérébraux (AVC). Une cause d’autant plus plausible que le père de Geneviève est décédé des suites d’un infarctus. Mauvaise pioche… Fin de non-recevoir également pour la tumeur au cerveau écartée à la suite d’une IRM.
“Il faut rester mobilisés”
« Plus le temps passait, et plus nous étions inquiets car les pathologies les plus connues étaient écartées. Entre bonne nouvelle et inquiétude générée par le fait de ne pas savoir, nous étions partagés. Nous avions l’impression d’avancer dans un tunnel de plus en plus sombre », se souvient Surya. Ce tunnel les mènera jusqu’à l’hôpital Pierre Wertheimer de Lyon et son service de neurologie dirigé par le Dr Emilien Bernard. Sur place, le jeu des pronostics se poursuit, même si pour la famille Bochaton, les possibilités se réduisent… Il faut dire que le Dr Bernard est un spécialiste reconnu des maladies de Parkinson et de Charcot. Qu’à cela ne tienne, nouveau pied-de-nez du destin en novembre 2021 lorsque le couperet tombe : Geneviève souffre de la maladie de Charcot, de son nom scientifique, la sclérose latérale amyotrophique (SLA) ! « Cette maladie bénéficie d’un Plan Maladies Rares, appelé à être renouvelé prochainement. Mais il faut rester mobilisé car cette pathologie se caractérise par une espérance de vie très réduite, de l’ordre de 3 à 5 ans en moyenne. On compte 5 nouveaux diagnostics par jour… et malheureusement 4 décès dans le même laps de temps. Il faut aussi savoir qu’il n’existe aucune prédisposition particulière, nous pouvons tous être concernés», explique Bettina Ramelet, directrice du développement des ressources au sein de l’Association pour la Recherche sur la SLA (ARSLA*). Suite au diagnostic, pour Geneviève, la prise en charge thérapeutique s’organise rapidement avec pour objectif de freiner l’évolution des symptômes de la maladie. Début 2022, Geneviève – 54 ans – a intégré un programme de recherche clinique dont elle bénéficie encore à ce jour.
Dans l’incertitude, toujours prévoir un plan b, c, d, e
De son côté, Surya et ses proches multiplient les initiatives pour en savoir davantage sur la maladie, notamment auprès de l’ARSLA 1er financeur privé de la recherche en France. Ils en arrivent, à chaque fois, à la même conclusion : profiter du moment présent ! « L’espérance de vie de ma mère n’est ni un tabou, ni une obsession. Mes parents prennent juste soin de faire toutes les choses dont ils ont envie aujourd’hui, tant que c’est encore possible physiquement. Et mon frère et moi nous les y encourageons comme pour la transpyrénéenne effectuée il y a quelques mois avec la moto de ma mère. Elle ne conduisait pas mais elle a pris toutes les décisions durant le trajet, avec toujours des plans b, c d, e… Cette moto, elle l’avait achetée trois semaines avant le diagnostic, alors pas question pour eux d’annuler le projet», se félicite Surya. Abandonner ne fait assurément pas partie du lexique familial. Surya, elle, c’est le sommet du Mont-blanc qu’elle entend marquer de son empreinte depuis des années. Le 8 juillet dernier, après plusieurs mois d’entraînements, l’objectif est atteint, en compagnie d’un ami dont le père est décédé des suites de la maladie de Charcot. La Savoyarde de 30 ans avait fait de ce projet personnel l’occasion de sensibiliser le grand public sur la maladie dont souffre sa mère. « Une maladie dont tout le monde a déjà entendu parler mais que personne ne connaît vraiment », se désole celle qui crée parallèlement l’association Cordée de copains, portée par une page Facebook et un compte Instagram. Des réseaux sociaux qui accueillent les photos de ses entraînements, de son ascension, mais aussi les photos de cordées anonymes transmises du monde entier, avec plus ou moins d’originalité.
9000 euros au profit de la recherche sur la SLA
« Les cordées sont le symbole de la solidarité et de l’entraide dans l’effort. Je trouve que c’est un beau message pour ne rien lâcher face à la maladie et pour que tout le monde se sente concerné. Nous avons eu droit à des cordées de montagne bien entendu mais aussi des cordées de personnes sur des chameaux, des cordées en solitaire, des cordées déguisées, et même une cordée dans le célèbre Central Park à New-York », décrit la fille de Geneviève… La mobilisation ne s’arrête pas là puisque l’appel aux dons permet de collecter plus de 9 000 euros au profit de l’ARSLA pour la recherche sur la maladie de Charcot. Soit le double de ce qui avait été envisagé, comprenez 4 809 euros, en référence aux 4 809 mètres du Mont-Blanc. Surya entend bien poursuivre l’aventure solidaire et familiale avec la secrète ambition de gravir un sommet européen par an… En attendant, avec ses proches, elle continue d’accompagner Geneviève au quotidien dans sa vie avec la maladie… Et, histoire d’en finir avec les pronostics inhérents à la maladie, Surya et son frère n’ont pas souhaité réaliser les examens leur permettant de savoir s’ils étaient ou non porteurs de la mutation génétique prédisposant à la maladie de Charcot. « Ça aurait pu nous rassurer mais à l’inverse ça aurait pu aussi mettre une épée de Damoclès au-dessus de nos têtes. Une menace, que pour ma part, je n’ai pas envie d’avoir. Je laisse la vie en décider… », conclut-elle.
Pour en savoir plus :
https://www.facebook.com/groups/455609686277644/
* A propos de l’ARSLA
L’ARSLA est une association nationale, créé en 1985, reconnue d’utilité publique et engagée dans l’aide matérielle, administrative, sociale et psychologique des personnes malades et de leurs proches mais aussi dans le financement de la recherche sur la SLA.
M-FR-00007427-1.0 – Etabli en octobre 2022