L’humour pour « dédramatiser l’existence ». L’humour comme « politesse du
désespoir ». Cette arme à nulle autre pareille est indiscutablement difficile à manier, mais ceux qui l’ont expérimentée en ont observé les bienfaits.
Je vais faire chauffer la vitale »,
nous raconte Sylvain, qui s’apprête à repartir pour un protocole de soins, à défaut de
« faire chauffer la carte bleue », comme le dit l’expression consacrée.
C’est sa façon à lui d’appréhender de manière plus décontractée le parcours qui l’attend. Moi, j’avais tendance à dire « je vais faire le plein », nous explique de son côté Christophe, quand il se rendait à ses chimio, avant sa guérison.
La pièce de Noémie Caillaut à laquelle nous consacrions récemment un article révèle bien à quel point le fait de rire de sa maladie permet de la mettre à distance. Il n’en demeure pas moins que ce n’est pas une démarche facile. Et que certaines personnes ont plus de facilités que d’autres à recourir à l’humour pour relativiser.
Quand on m’interroge sur mon cancer du côlon, je dis qu’heureusement que je suis là « pour faire baisser les statistiques », fait observer Emma avec un sourire, du haut du ses 36 ans. A choisir, elle estime que mieux vaut en rire qu’en pleurer, quand bien même le protocole qu’elle a suivi a été, de son propre aveu, extrêmement « pénible ».
Soyons clair : rire de la maladie ne signifie pas qu’on la minimise ou qu’on n’affronte pas la réalité en face. Cela revient à la mettre à distance en soulignant son caractère absurde. L’avantage du rire, c’est qu’il génère des endorphines, produites par le cerveau, sous l’effet d’une émotion positive. Or il est démontré que cela permet d’atténuer la douleur et de diminuer le stress. On dit même que cela favoriserait les défenses immunitaires et permettrait de mieux garder espoir.
Il ne s’agit pas d’être dans le déni d’une situation dramatique, mais de prendre du recul par rapport à cette situation en adoptant un autre point de vue. Et de toute évidence, il y a des moments où l’on ne peut pas rire car la douleur ou l’angoisse sont trop insupportables.
Quand j’y arrive – et ce n’est pas systématique – c’est en quelques sorte une victoire sur le sort. J’ai alors le sentiment de mieux maîtriser »,
raconte Delphine, qui lutte depuis des années contre un cancer du sein.
Bénédicte, elle, a trouvé une autre parade : évacuer les personnes toxiques et ne s’entourer que de gens drôles.
Je regarde des films comiques et, à défaut de parvenir à rire de ce qui m’arrive, j’essaie de baigner dans une atmosphère positive. Je ne veux pas que la maladie prenne toute la place. J’aime trop la vie ! »,
explique-t-elle. Et pour le moment, elle s’abreuve de cette philosophie sans
modération !