Il n’aurait pu être « qu’une personne en situation de handicap parmi d’autres », mais Pierre-Mickaël Hugues a choisi de s’engager. Boxeur talentueux, il est le seul athlète en situation de handicap à évoluer parmi les valides. Cet infirmier de formation bouleverse les codes et entend faire évoluer les représentations. Assurément, son autre combat en dehors des rings.
Depuis 30 ans, cet infirmier de formation démontre une admirable force de caractère. Né avec une malformation congénitale au niveau des tibias, il est devenu boxeur émérite. « Même si je réfute l’image de symbole ou d’exemple à suivre qu’on me prête parfois, je suis la preuve vivante que dans la vie, tout n’est pas toujours gagné d’avance. Il y a des hauts et des bas mais avec de la détermination, on peut réussir de belles choses, mener à bien des projets et être épanoui », analyse-t-il. À condition de faire les bonnes rencontres.
Heureusement pour moi, pour concrétiser mes ambitions personnelles, professionnelles et associatives, j’ai pu compter sur la précieuse aide et la confiance de bénévoles, de partenaires institutionnelles et la fédération de boxe », confie ce sportif appliqué et accompli !
Déjà une vingtaine de combats à son actif
Non content d’avoir opté pour la boxe à l’âge de 18 ans – date depuis laquelle il s’entraîne 10 à 15 heures par semaine – il combat officiellement chez les “valides” depuis 2016 ! Une situation inédite puisque Pierre-Mickaël Hugues est aujourd’hui le seul sportif au monde en situation de handicap à boxer à haut niveau et à représenter la France à l’international ! Et pas question pour lui de faire de la figuration ou de servir de faire-valoir. À 30 ans, il en est déjà à une vingtaine de combats auréolés de victoires retentissantes. Si certains pourraient le croire arrivé, il rappelle que sa lutte est quotidienne. La remise en question aussi.
Malgré de bons résultats, c’est encore compliqué de trouver des adversaires dans ma catégorie car les préjugés ont la dent dure. Et beaucoup ne veulent pas prendre le risque de perdre contre une personne qui a des prothèses à la place des jambes.
À chaque fois, c’est le même scénario : quand je rentre dans une salle, il y a un silence de cathédrale, le public surpris est abasourdi, mais une fois que la cloche retentit, tous se rendent compte que je suis un vrai boxeur, et que je ne suis pas là pour faire acte symbolique de présence », se réjouit-il.
Porteur de la flamme olympique à Paris
On comprend mieux pourquoi Pierre-Mickaël Hugues a été choisi pour rejoindre le cercle très fermé des porteurs de la flamme olympique. Plus qu’une récompense et un honneur pour ce médaillé d’argent des championnats de France militaire (2022), pensionnaire de l’équipe de France – c’est aussi l’occasion de sensibiliser le grand public aux bienfaits de la pratique sportive malgré le handicap. Un cheval de bataille qu’il combine avec sa mobilisation pour favoriser l’insertion sociale et professionnelle. Voilà pourquoi, en parallèle de son activité d’infirmier, il est pleinement engagé au sein de la sphère éducative. Sa collaboration avec le ministère de la Justice s’est concrétisée par plusieurs interventions au sein de différents centres de rétention pour mineurs.
« De par mes rencontres et mon expérience, je me rends compte que le plus compliqué ce n’est pas d’avoir des prothèses au quotidien, mais c’est le facteur humain associé au handicap ou autres problèmes auxquels chacun peut être confronté. Les difficultés d’ordre affectif, émotionnel et social sont les plus complexes à appréhender et surmonter, et ce, quelle que soit votre condition physique. Si vous perdez un proche, vous aurez certainement plus de mal à aller travailler et reprendre goût à la vie qu’une personne en fauteuil qui a organisé sa vie en fonction de son handicap. Je ne dis pas que ma vie est facile tous les jours mais juste qu’il existe toujours une voie à emprunter pour s’accomplir », déclare-t-il.
Faire de son handicap et du sport en général des leviers pour aller à l’encontre des représentations sociales : c’est la stratégie adoptée par Pierre-Mickaël pour initier une interaction avec son public, diffuser ce goût de l’effort et cette culture de la réussite. Il semble bien loin le temps du collégien en échec scolaire, car il finalise un mémoire de recherche dans le cadre d’un master 2. Après avoir déjoué la plupart des pronostics, il ne compte pas s’arrêter en si bon chemin. L’idée de participer aux Jeux olympiques et paralympiques de Los Angeles en 2028 commence à germer.
On verra où je serai dans 4 ans, mais j’ai soif d’autres projets à accomplir individuellement et collectivement », conclut-il.
M-FR-00011996-1.0 – Établi en juillet 2024