Le lymphome, un coup de tonnerre dans la vie de ce jeune papa

Le lymphome, un coup de tonnerre dans la vie de ce jeune papa

Dan est tombé malade dans un contexte un peu particulier, puisqu’il allait devenir papa. Il raconte la brutalité du diagnostic, les troubles qui l’ont assailli, mais aussi ce qui l’a aidé à faire face et livre quelques conseils pour les patients concernés par la maladie.

Ma fille est née trois jours après l’annonce de mon lymphome. Ca a été un coup de tonnerre dans un ciel serein ».

La maladie lui est tombée dessus, du jour au lendemain, alors que tout allait pour le mieux.

Et puis soudain, on se sent mal.
On ne sait pas ce qu’on a. Dans un premier temps, l’hypothèse d’une mononucléose a été envisagée. J’ai trouvé cette perspective pénible, à quelques jours d’être père, jusqu’à ce que je sache ce qui m’arrivait vraiment. A ce moment là, j’aurai tout donné pour que ce soit une mononucléose
».

La greffe de moelle, seule voie de sortie

Brutalement, Dan s’est retrouvé dans un « no man’s land ». Pour ne rien arranger, sa fille a contracté une septicémie à trois jours de vie, et s’est retrouvée dans un service de néo-natalité. « Je me fichais de ce qui m’arrivait, du moment qu’elle s’en sortait », explique Dan, qui, de son côté, s’est rapidement retrouvé à la Pitié, dans une chambre stérile après qu’on lui ait diagnostiqué un lymphome lymphoblastique. Une série de chimios étalée sur plusieurs mois aurait été la suite logique, sauf que Dan n’était pas chimio-répondant. La seule voie de sortie, c’était la greffe de moelle osseuse.

« Ma sœur était compatible. C’était une ouverture lumineuse m’offrant une opportunité de guérison. Le processus a duré cinq mois, puis je suis rentré trois semaines chez moi, avant d’être de nouveau en chambre stérile pendant cinq semaines », se souvient Dan.

 

Gérer le stress des proches, une chose insupportable

Ce qui l’a le plus aidé pour combattre la maladie ? Sa capacité à gérer la solitude. La gentillesse du personnel soignant. Le fait d’écrire puis, de s’enregistrer tous les jours, quand son état ne lui permettait plus de griffonner ses états d’âme sur le papier. Les échanges avec sa sœur aussi, « une des seules à le comprendre, à lui parler normalement, et même à l’engueuler quand elle n’était pas contente », là où les autres avaient tendance à tout lui laisser passer.

« Gérer le stress de ses proches, c’est insupportable, surtout quand on est soi même inquiet et mal en point. Je lisais dans leurs yeux que je risquais d’y passer. J’ai même demandé pendant une courte période à mon père de ne plus venir ».

Parfois, il aurait préféré ne pas avoir ni à parler, ni à entendre. Il y a des situations dans lesquelles un simple geste tendre ou affectueux suffit, et dans lesquelles les mots sont superflus. Mais pas simple quand on est en chambre stérile ! Précisément parce que le toucher est parfois bien plus puissant que des paroles, il se souvient avoir été particulièrement ému par un massage des mains, prodigué par une infirmière, « les personnes les plus humaines dans un hôpital ».

Il reconnaît aussi n’avoir pas toujours été un patient « facile », au sens où il se plaignait souvent. De la nourriture, de la qualité du wifi… « Un bon signe », selon l’un de ses médecins : celui qu’on ne se laisse pas complètement “passivé” par l’environnement, qu’on a encore l’espoir que l’on peut agir sur lui. En attendant, dans cet état de totale infantilisation, il n’y avait rien à faire au sens propre comme au sens figuré, si ce n’est : « tenir bon ».

« Le principe de responsabilité disparaît, c’est comme un retour à la matrice. On subit et on attend que quelque chose se passe ».

 

La reprise d’une vie normale

Le jeune homme a fini par guérir, mais il était dans un piètre état. « Une loque
humaine », selon ses propres termes. Affaibli à la fois physiquement et moralement, il a néanmoins eu le courage de reprendre des études pour devenir psychologue.

« Contrairement à ce que beaucoup de gens pensent, ce n’est pas la maladie qui m’a conduit vers cette profession. J’y pensais depuis longtemps déjà »,

analyse celui qui avait été auparavant journaliste, puis directeur de projet dans une entreprise multimédia ayant pignon sur rue. La maladie a été pour lui un moment particulièrement violent, intense et perturbant psychiquement.

« C’est insupportable d’être confronté à la possibilité de sa fin. Certes, nous avons des défenses assez fortes, comme le déni. Personnellement, je n’ai jamais toléré l’idée que j’allais peut-être mourir. Quand elle s’imposait à mon esprit, je la chassais aussitôt. J’étais certain que j’allais m’en sortir. Je voulais connaître mon enfant ».

Prendre du recul pour comprendre

Des années après, il a parlé avec elle de ce qui lui était arrivé. Mais aussi avec sa deuxième fille, conçue par insémination artificielle puisque les traitements l’ont rendu stérile. « Elles savent ce qui m’est arrivé, mais elles savent aussi que je suis tiré d’affaire », souligne Dan.

Et s’il a un message à faire passer aux patients concernés par la maladie, c’est d’abord de croire en eux-mêmes. Même s’il avoue qu’il est parfois difficile de croire en soi quand on devient un objet du corps médical. A défaut d’être croyant et de pouvoir ainsi se reposer sur une conviction religieuse pendant son courageux combat, Dan s’est souvent accroché à ce qu’il appelle « une forme de pensée magique », celle qu’il allait s’en sortir, et qu’il y avait une lumière au bout du chemin.

Il y a une deuxième chose qu’il aimerait transmettre et qui tient en six mots : « ne vous sentez pas TROP coupables » . Difficile évidemment d’échapper aux « pourquoi
moi ? », « qu’est ce que j’ai fait pour mériter ça? » Il peut même être sain de culpabiliser un peu :

« cela permet de reprendre le contrôle à un moment où tout vous échappe. On se dit que s’y on est un peu pour quelque chose dans la maladie, on y sera peut-être aussi pour quelque chose dans sa guérison. Mais cette culpabilité ne doit pas vous envahir. Elle doit rester limitée. Sinon, on peut vite se sentir submergé et ne faire que subir. ».

C’est un patient qui le dit, mais aussi un psy !