Qu’est ce que le syndrome de Kawasaki ?

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Qu’est ce que le syndrome de Kawasaki ?

Ces dernières semaines, il a beaucoup été question de cette maladie, qui touche essentiellement des enfants, partout dans le monde. Plusieurs médecins émettent l’hypothèse d’un lien de causalité avec le Covid-19, même si ce dernier ne peut être établi de façon formelle. 

Le décès d’un enfant de 9 ans à Marseille le 9 mai dernier a alimenté les inquiétudes, d’autant que dix jours plus tard, c’est un bébé de 18 mois qui mourrait de cette même maladie au Royaume-Uni. L’infection s’attaque aux vaisseaux sanguins, avec des conséquences très graves pouvant aller jusqu’à l’arrêt cardiaque.  Ces deux drames sont très choquants et interpellent sachant qu’il était communément admis depuis le début de l’épidémie de coronavirus que les enfants étaient épargnés.

Kawasaki, kesako ?

Si le nom est japonisant, c’est parce que ce syndrome a été découvert au Japon en 1967 par le Dr Kawasaki. Il s’agit d’une maladie des vaisseaux sanguins touchant les veines et les petites artères. Elle frappe des enfants, généralement entre 1 et 8 ans.

Cette maladie est une vascularite qui touche le cœur et les artères coronaires. Elle est très rare en occident, où elle touche là aussi en immense majorité les enfants. Elle peut s’observer chez les adultes, mais de façon très rare. La cause de ce syndrome vasculaire reste indéterminée”,

explique le Dr Loîc Guillevin, spécialiste en médecine interne à l’hôpital Cochin. Cette nouvelle infection a été rebaptisée « MIS-C » (Multisystem inflammatory syndrome in children) par les autorités sanitaires américaines et par l’Organisation Mondiale de la Santé. Elle inquiète un peu partout dans le monde, d’autant que cette recrudescence d’infections semble avoir un lien avec le Covid-19.

Quels en sont les symptômes ?

“ Le tableau initial ressemble un peu à la rougeole. Les symptômes du MIS-C sont nombreux : forte fièvre, douleurs abdominales et troubles digestifs (notamment vomissements et diarrhées), mais aussi une éruption cutanée et parfois une conjonctivite”, ajoute le Dr Guillevin. La langue peut rougir, gonfler et prendre un aspect de framboise. Les ganglions et les problèmes respiratoires sont également fréquents. Une  inflammation du tissu musculaire du cœur peut se manifester et aboutir à des défaillances cardiaques.

Selon bon nombre d’infectiologues, il semblerait que ces symptômes soient provoqués par un système immunitaire qui réagit trop fort, créant ainsi des dégâts. Les enfants concernés ont besoin d’un traitement en soins intensifs urgent. La plupart sont très malades pendant quatre à cinq jours, mais leur état s’améliore ensuite.

Y a-t-il vraiment un lien avec le coronavirus ?

“ Les cas récents de Kawasaki associés à l’infection par le Covid 19 ont à la fois les signes cardiovasculaires et les signes prédominants et inauguraux ”, relève le Dr Guillevin. Une poignée de patients adultes touchés par le coronavirus ont présenté ce même « emballement » du système immunitaire, débouchant sur une réaction hyper-inflammatoire pouvant devenir mortelle. Le MIS-C est donc fortement soupçonné d’être lié au coronavirus.  La concomitance entre les deux pathologies est en effet troublante.  Lors d’un point presse, Damien Bonnet, spécialiste des maladies rares à l’hôpital parisien Necker-Enfants Malades a rappelé qu’on observe habituellement une forme sévère de la maladie de Kawasaki par mois, alors qu’en trois semaines, une vingtaine a été recensée. Une majorité des enfants frappés ont été testés positifs au Covid-19.

Une réaction postérieure au coronavirus ?

Et si le syndrome de Kawasaki était un dommage collatéral? Autrement dit, il serait un phénomène inflammatoire à retardement. Cette thèse de la maladie post-infectieuse avec une réaction secondaire à l’infection fédère quelques experts, selon lesquels l’emballement du système immunitaire constaté chez les enfants touchés pourrait être une suite de leur contamination au coronavirus. Dans un premier temps, les bons anticorps se mettent en marche, avant qu’un certain nombre de cellules commencent à se mettre en marche de manière excessive. Le Dr Guillevin, lui, envisage un lien de cause à effet entre les deux pathologies. 

144 cas de Kawasaki  en France et 230 en Europe

En France, en date du 15 mai, on comptait 144 signalements de maladies systémiques atypiques pédiatriques dans le pays, contractées depuis le 1er mars, selon les chiffres de Santé publique France. A noter qu’un séjour en réanimation a été nécessaire pour 65 de ces enfants et en unité de soins critiques pour 25 d’entre eux. La plupart des cas sont concentrés en Île-de-France (dont 42 hospitalisés à l’hôpital Necker). En Europe, ce sont quelque 230 enfants présentant un syndrome de Kawasaki qui ont été recensés, en Espagne, en Belgique, ou dans le nord de l’Italie, où l’épidémie de Covid-19 a fait des ravages, selon les chiffres de l’ECDC (le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies). Certains médecins mettent en avant le fait que la génétique pourrait être déterminante. Il apparaît en effet qu’un grand nombre de cas observés sont « d’origine afro-caribéenne ».

Faut-il s’inquiéter ?

L’Organisation Mondiale de la Santé s’est voulue plutôt rassurante et a rappelé que la vaste majorité des enfants atteints du Covid-19 n’ont qu’une légère infection et se remettent complètement.  Et que cette maladie reste heureusement très rare. Cette institution a toutefois appelé les autorités sanitaires à lui faire remonter les cas et a annoncé le démarrage d’une étude pour déterminer le lien entre cette nouvelle infection et le Covid-19. Le Dr Guillevin précise quant à lui que le syndrome se traite efficacement avec une perfusion d’immunoglobulines. “Une fois que c’est fini, c’est fini. Les patients guérissent tous, mais on ne sait pas ce qui va se passer dans les années qui suivent”, nuance-t-il.