Voyage en enfer

Cancers
Voyage en enfer

A l’âge de 38 ans, Anne effectue une visite de routine chez le gynéco. Sa vie bascule alors

« C’était le choc. Il a senti une grosse boule. J’ai vu dans ses yeux son inquiétude lorsqu’il m’a pressé de vite faire les examens complémentaires », raconte-t-elle. Lors de la biopsie, elle réalise que le jeune médecin est très affecté car il a compris. « Je sens son regard sur moi, je me retourne et vois qu’il me fixe d’un air désolé, plein de pitié. je n’ai pas besoin d’avoir les résultats pour comprendre ce qui m’arrive », écrit-elle. Elle en fait part à ses proches, puis à son patron. Plutôt antipathique, ce dernier lui recommande néanmoins de ne plus penser au boulot , et de ne pas s’inquiéter car elle retrouvera son poste à son retour.

« J’étais désespérée et très en colère envers tout, moi qui n’avais jamais fumé, jamais bu une goutte d’alcool, ayant toujours mené une vie saine, pourquoi ça m’arrivait à moi ? et mes enfants si petits, pourquoi devaient-ils souffrir à cause de moi alors qu’elles avaient 6 et 9 ans ? j’étais révoltée… », précise-t-elle. Elle subi d’abord une opération. On lui enleve la tumeur sans ablation. Puis vient la chimio, tellement éprouvante physiquement.

« Je me voyais dépérir, je gonflais, me fripais, devenais chauve, j’étais épuisée sans oublier ces tas de médicaments contre tous les effets secondaires, ces terribles nausées, ce goût de métal dans la bouche qui dénature tous les aliments, ces aphtes, ces problèmes intestinaux, ces terribles douleurs dans les os, gencives et articulations, un véritable enfer, et cette fatigue pesante insurmontable, ne plus supporter le son de la télé même bas, ne pas pouvoir porter une casserole… », tel est son quotidien.

Elle craint de ne jamais s’en remettre, même avec l’amour des ses enfants qui l’ont toujours regardée comme une maman. Ereintée, elle subit alors la douleur de perdre son père d’un cancer de la prostate. « Je n’avais pas pu le revoir depuis 3 mois car lui plein d’infections et moi sans défenses immunitaires, les médecins m’avaient dit que moi j’avais une chance de m’en sortir mais pas lui, alors qu’il ne fallait pas que je cours le risque d’attraper ces infections en allant le voir »

Anne n’en peut plus. Elle écrit au pape en lui demandant pourquoi son Dieu lui fait subir toute cette souffrance physique et morale.

Malgré une sciatique, elle doit prendre le RER bondé chaque jour et personne ne lui laisse de place assise : « Avec mon foulard, tout le monde me prenait pour une convertie et pas pour une cancéreuse, pourtant je n’avais plus ni cils ni sourcils., il suffisait juste de me regarder pour comprendre mon malheur… »

Anne se sait en survie. Le plus dur est passé, mais il lui faut attendre et se reposer. Ses cheveux ont commencé à repousser, tout doucement, mais les traitements vont durer encore 5 ans…

Arrêtée pendant 14 mois, elle reprend un mi-temps thérapeutique… mais se couche à 20 h tous les soirs tellement elle est fatiguée. Pendant l’été 2013, le déclic arrive : « j’ai décidé de vivre pour ce qu’il me restait à vivre… je me suis occupée de moi, racheté des fringues, j’ai retrouvé le sourire et une gaieté que j’avais perdue. Maintenant je ne pense qu’à moi, en plus des enfants. Certains qui m’avaient croisée malade avec mon foulard n’en reviennent pas de me voir si joyeuse, et si rayonnante… »
Elle recommande à ceux qui vivent cet enfer de garder espoir, car le tunnel est long mais il y a une lumière au bout !