Cancer et travail : des avancées encourageantes

Cancer et travail : des avancées encourageantes

Les demandes relatives au droit du travail et au maintien dans l’emploi affluent auprès de l’association Juris Santé dont Dominique Thirry est Directrice. Son équipe accompagne des patients qui s’interrogent sur la façon dont ils vont pouvoir reprendre leur activité et faire valoir leurs droits.

Cette association a pour mission d’informer, d’expliquer et d’orienter les patients et leurs proches sur les questions juridiques, administratives ou financières posées par la survenue d’un cancer. L’association propose également une écoute, des réponses et un accompagnement socio professionnel de maintien ou retour à la vie active.

Première édition du colloque Cancer et travail

En juin dernier, Juris Santé a organisé un colloque sur le thème « Cancer et travail », grâce au soutien de Roche et de la fondation Roche, du groupe Casino et de l’Hôpital Privé Jean Mermoz (GDS) avec le soutien institutionnel de l’ANDRH et du Groupe APICIL « Plus de 170 personnes se sont inscrites et 157 ont assisté à la première édition de ce rendez-vous. Ces chiffres sont encourageants car ils montrent l’engagement des entreprises. Cela donne envie de poursuivre l’initiative », explique Dominique Thirry. Des DRH, mais aussi des consultants, des représentants des établissements de santé , mais aussi des patients et des aidants sont venus de la France entière pour assister à cet événement à Lyon. Le Professeur Pierre Vidal-Naquet, sociologue et le Docteur Jean-Pierre Martin, oncologue médical à l’Institut de Cancérologie Jean Mermoz de Lyon, ont témoigné, auprès d’institutionnels, d’autres professionnels de santé et d’entreprises, de leurs expériences.

Dans l’intérêt des entreprises

« L’accompagnement individuel ou collectif dans le cadre d’un retour à l’emploi est désormais un sujet dont beaucoup de personnes s’emparent, et l’on ne peut que s’en réjouir. Le plan cancer III n’y est pas étranger car ce sujet fait partie du parcours de vie du patient et de l’après cancer », note Dominique Thirry. Pour elle, sans nul doute, mieux on anticipe ce retour, mieux la situation se passe. Et les entreprises ont bien compris leur intérêt à se positionner sur ces problématiques. En effet, les autres collaborateurs, du fait d’aménagement des temps de travail ou de ce dernier, se retrouvent le souvent avec une charge de travail supplémentaire et des conditions de travail dégradées. Pour éviter rancœurs et malentendus, mieux vaut faire en sorte que la donne soit clairement expliquée, avec pédagogie, de façon à ce qu’elle soit mieux perçue et non pas vécue comme une injustice. Chacun, à tour de rôle, et pour des raisons variées, peut être fragilisé. « Certaines entreprises sont très mobilisées. D’autres hésitent davantage à se poser des questions car elles ont peur d’ouvrir ce qui pour elles représente encore la boîte de Pandore. Nous sommes extrêmement sollicités sur les outils juridiques, comme par exemple le temps partiel thérapeutique », note Dominique Thirry. Et d’ajouter : « les petites et moyennes entreprises nous contactent très régulièrement car elles ne disposent pas toujours de services RH. Elles s’interrogent sur la législation ». En effet, la santé d’une entreprise peut être impactée par la mauvaise organisation d’un retour.

Un module de formation e-learning accompagné d’une formation d’une journée en intra

Elle se réjouit du soutien de l’Inca (l’institut national du cancer) pour la mise en place de dix formations à destination des entreprises, avec notamment des modules de e-learning. Ce projet, dans le cadre duquel elle jouera un rôle de coordinatrice et d’animatrice, a été développé par l’EFEC (l’école de formation en cancérologie) . « Un cas de cancer du sein sera en quelque sorte notre fil rouge, car nous nous sommes aperçus que c’est l’une des pathologies qui pose le plus de difficultés pour le retour en entreprise », observe-t-elle. A ses yeux, ces formations ne sont qu’un début. A terme, il s’agira d’affiner l’offre et de continuer à diffuser la bonne parole.

Si l’association Juris Santé accompagne désormais quelques entreprises dans le but de faire progresser les bonnes pratiques, elle ne perd pas de vue les droits des patients. « Il nous arrive d’avoir de bonnes surprises et de constater que certaines personnes, qui devaient renoncer à leur ancien poste car il impliquait par exemple trop de déplacement, se sont vues offrir des promotions. Ce type de cas reste minoritaire mais mérite d’être souligné. Il faut s’appuyer sur ces signes et faire évoluer les pratiques », ajoute Dominique Thirry. D’autant que de plus en plus de personnes entre 35 et 55 ans sont chronicisées. Elles ne souhaitent pas toujours abandonner leur travail mais aimeraient bénéficier d’ajustements. « A noter, relève Dominique Thirry, il ne faut pas toujours diaboliser les entreprises. Il n’est pas rare qu’elles proposent des alternatives au patient, lequel ne peut pas toujours répondre favorablement, par exemple parce que le nouveau poste proposé implique un déménagement ou des trajets trop longs ». Mais là encore, mieux vaut ne pas tomber dans l’angélisme. Encore beaucoup de structures tentent de dissuader leurs salariés de revenir et ne font preuve d’aucune empathie. « Il nous faut parfois lutter pour faire entendre raison aux patients et les inciter à continuer de se battre pour faire valoir leurs droits, sans renoncer aux aménagements auxquels ils peuvent prétendre, et surtout sans verser dans la culpabilité », conclut Dominique Thirry. La preuve que de part et d’autre, il y a encore beaucoup de chemin à faire !

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